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Vivre avec un conjoint Huntington et des enfants-ado

Message par Clémence » 18 mars 2019 12:35

Bonjour,
Mon mari (48 ans) a commencé à développer la MH. Il refuse de faire le test, d'avoir un suivi spécifique.
Il n'a vu que deux fois une équipe neurologique, qui étant donné son histoire familiale et les premiers symptômes visibles, n'a eu aucun doute sur le diagnostic.
Depuis près de 3 ans et demi, il ne travaille plus et reste à la maison. Il n'a pas (encore) besoin d'une présence permanente et peut rester seuls quelques jours. Il prend des antidépresseurs pour stabiliser son humeur et n'est suivi que par son médecin généraliste.
Nous avons deux enfants de 8 et 12 ans et mon mari s'énerve de temps et temps de façon exagérée contre notre fils de 12 ans (même si à la base il a raison de s'énerver, c'est l'ampleur de son énervement qui est totalement inapprorié). Il a dans ces moments des paroles très dures et blessantes, contre lesquelles je me suis immunisée, mais qui blessent notre fils de 12 ans. Surtout, mon mari n'arrive pas à prendre de la distance, à garder son calme tout en restant dans l'autorité parentale.
Je redoute la future adolescence de nos enfants et la difficulté qu'il y aura à gérer mon mari (en fonction de l'évolution de sa maladie) et mes enfants (qui seront dans la phase de transformation de l'adolescence.
Qui a déjà traversé une période similaire avec des ados et un parent MH?

Re: Vivre avec un conjoint Huntington et des enfants-ado

Message par Michelle » 18 mars 2019 21:52

Bonjour,

Lorsque la maladie s'est déclarée chez mon époux, nos enfants étaient respectivement âgés de 6 et 10 ans.
Mon époux a souhaité que nos enfants soient mis au courant.
Nous avons donc (bien que cela a été très difficile pour moi) choisi un moment et tous les deux, nous avons expliqué la MH (le basique, sans trop entrer dans les détails telles que l'hérédité qui a été abordée plus tard), répondu à leurs questions et laisser les enfants assimiler les informations et attendre par la suite de nouvelles questions de leur part (et bien sûr, nous leur avons précisé que des chercheurs du monde entier travaillaient sur cette maladie).

Cette discussion a permis notamment aux enfants de comprendre les comportements, parfois un peu bizarres, de leur père (il n'était pas colérique vis à vis de nous) ; et en aparté, je leurs avait précisé que ces comportements étaient dus à la maladie.
Le dialogue avec les enfants est très important, les laisser dans l'ignorance ne fait qu'aggraver leur mal-être ; ils peuvent être en mesure de comprendre, même à un âge si jeune.

Par la suite, ils ont été tenus informés de tout ce qui se passait avec leur père jusqu'à son décès ; j'avais même discuté avec eux de son placement dans un établissement (ils avaient alors 10 et 14 ans).
Je n'ai pas rencontré de grandes difficultés lors de leurs adolescences tant au niveau de la scolarité qu'au niveau du quotidien (je pense que de manière générale les enfants, dans une telle situation, ne veulent pas rajouter des problèmes).

Encore une fois, le dialogue avec les enfants (mais également avec le papa) tout au long de la maladie est important et sincèrement, j'ai pu constater qu'il a été bénéfique ; nos enfants sont aujourd'hui des adultes parfaitement informés sur la MH et vivant pleinement leur vie.

Peut-être pour vous aider, des articles :

https://www.huntington-inforum.fr/index.php/inf ... ants-et-mh
https://www.huntington-inforum.fr/images/Docume ... _et_MH.pdf

Si vous avez d'autres questions, n'hésitez pas.

Re: Vivre avec un conjoint Huntington et des enfants-ado

Message par Morgane » 20 mars 2019 09:47

Bonjour Clémence,
Ma maman, aujourd'hui décédée, était atteinte de la MH.
Les premiers signes ont commencés, je n'étais encore qu'une enfant âgée de 8ans à peu près.
La maladie a évoluée très vite car maman ne voulait pas être suivie, elle ne prenait pas ses médicaments, refusait toutes aides venant de l'extérieure.
Mes parents sont divorcés, je ne les ai jamais connu ensemble mais personne ne m'avait parlé de maladie et ça a été très très dur pour moi de voir ma maman avoir des comportements inappropriés avec moi sans que je sache pourquoi.
Je vais aller plus loin mais j'en avais honte ... j'en avais honte car je ne savais pas, je connaissais pas les tenants et les aboutissants de la maladie et aujourd'hui avec le recul, tout est plus clair.

Parlez-en avec vos enfants, je sais que j'ai perdu énormément de temps avec ma maman que je ne pourrais jamais rattraper parce que personne n'a su m'expliquer, me dire ce qu'il se passer.
A mon adolescence, j'ai passé 2 ans sans voir ma maman, sans avoir de nouvelles et surtout en la laissant terriblement seule ... et c'est très dur à accepter !
Je pense qu'il vaut qu'ils soient au courant, ce sera certainement dur à expliquer, dur à accepter pour eux, mais il faut qu'ils aient pleinement conscience que le comportement de leur papa n'est dû qu'à la MH et que tout cela pourrait être différent s'il n'était pas porteur ...

Je vous apporte tout mon soutien

Morgane

Re: Vivre avec un conjoint Huntington et des enfants-ado

Message par Piano » 21 mars 2019 22:24

Bonjour Clémence

Votre mari a des symptômes reconnus par des neurologues et il ne veut pas encore faire le test. Compte tenu des symptômes, je pense que c’est important de dire à vos 2 enfants que leur père n’est pas méchant ou agressif mais simplement malade. Ils risqueraient sinon d’avoir une image de leur père faussée. En fait, c’est totalement différent, me semble-t-il, pour un enfant ou un ado en construction d’avoir un père méchant ou d’avoir un père malade. S’il est malade leur père a besoin d’être aidé, compris, toléré, il souffre de maladie, même si je sais qu’en pratique ce n’est pas simple. S’il est méchant, c’est autre chose.

Vos enfants, à risque je crois, ne sont plus tout jeunes, au-dessus de l’âge de « raison ». Si j’étais à votre place, mais je n’y suis pas, je leur parlerais doucement du fait que c’est une maladie héréditaire et qu’eux aussi peuvent avoir comme leur père un risque de 50% de chance d’être malade un jour. Je dis cela, je peux me tromper, mais une fois l’émotion passée, cela pourrait augmenter le lien entre eux et leur père. Ce lien est déjà peut-être très fort. Cela pourrait les rapprocher encore plus de leur père dans ces moments difficiles parfois. Ce lien est très important. Il me semble que les enfants comprennent les choses et ne dramatisent pas comme nous le ferions. La réalité, comme le dit bien Morgane, c’est que leur père est simplement malade. Et leur dire en même temps que la médecine cherche de façon très intense une première parade pour la maladie. Les enfants pourraient participer à la recherche s’ils le souhaitaient un jour quand ils seront majeurs, c’est-à-dire dans 6 ans pour l’ainé, même sans avoir besoin de faire le test.

Il me semble important que votre mari ait conscience qu’il ne peut pas être dans des libertés de langage excessives avec ses enfants, ni avec personne d’ailleurs. Ce serait bien que quelqu’un lui dise, sans nécessairement lui parler de la MH. Par exemple le médecin traitant ou un ami ou une personne qui convient, lui dire que s’il continue ainsi sans se soigner ou sans faire attention à son langage … il va se retrouver rapidement dans un hôpital psychiatrique. C’est important que votre mari ait quand même un cadre par rapport à cela vis-à-vis de ses jeunes enfants. Vous, vous savez maintenant comment vous devez le prendre et vous immuniser, mais néanmoins pour les autres ce n’est pas simple. Il peut avoir son autorité et son rôle de père et c’est même tout à fait souhaitable et même recommandé en tant que père. Mais pas dans des excès incontrôlés de langage comme ils arrivent de temps en temps.

Pour la gestion à venir de votre mari, un proverbe dit que le pire n’est jamais certain. Comme c’est une maladie chronique il va devenir malade avec des symptômes qui s’accentuent. Pour lui ce n’est pas facile. Comme il est dans un semi-déni, il va, me semble-t-il, probablement aller vers une acceptation complète de la maladie à un moment donné. Le lien avec lui est essentiel, dans le respect de vos propres limites, et il faut tenir bon d’ici là. Il y a dans le cadre des protocoles de suivis neurologiques des activités organisés ( Kiné, orthophonie suivi psy etc.) dont il pourra bénéficier à un moment. Et la médecine avance et qui sait si demain ils ne proposent pas quelque chose concrètement. Et il y a aussi, le facteur psychologique avec les Centres Médico Psychologiques et les thérapies familiales où vous pouvez tout dire et exprimer avec des professionnels.

A ma connaissance, l’adolescence est une période avec des hauts et des bas, un peu en dents de scie. Les adolescents s’identifient aux figures adultes, vont voir à l’extérieur et cherchent des idéaux. Un père malade, cela arrive et en terme d’identification s’identifier à une famille qui souffre, qui se soutient, qui s’aide, qui a du courage face à l’adversité, qui fait face aux problèmes, c’est une beauté aussi et une force de construction également, me semble-t-il.

Donc la maladie peut être l’occasion de plus de cœur, de plus de fraternité, de plus d’entraide ou au contraire elle peut séparer.

Michelle montre l’exemple d’une famille que la maladie a plutôt rapproché. Morgane montre l’exemple d’une famille que la maladie a plutôt séparé.

Bon courage Clémence, vous en avez beaucoup sur les épaules et bon courage à tous.

Re: Vivre avec un conjoint Huntington et des enfants-ado

Message par Clémence » 23 mai 2019 11:13

Bonjour à toutes et tous,

Merci pour votre soutien et vos réponses que je viens de lire car je n'étais pas revenue sur le forum depuis quelque temps.
Elles me donnent du courage pour avancer dans ces semaines difficiles.

Je sais que mon mari est malade et que c'est sa maladie qui provoque ses crises de méchancetés et d'agressivité. Ces crises et leur imprévisibilité nous poussent à bout. C'est dur émotionnellement et aussi au niveau du quotidien car il faut en permanence être prêt à s'adapter et modifier ce qui est programmé.

Voilà ce que nous avons entendu ce matin "rentre le plus tard possible à la maison" (à mon fils), "je prends des antidépresseurs pour te supporter" (à moi), "tant que je ne frappe pas les enfants, je peux être méchant" ( à tout le monde).
Il y a une semaine, il m'a empêchée de dormir une nuit entière pour des raisons dont j'ai aujourd'hui de la peine à me rappeler, en me disant que si je mourrais dans un accident de voiture, cela lui était égal...

Jusqu'à présent, j'ai manqué de courage pour lui parler de ses crises en dehors des moments de crise justement. Je ne voulais surtout pas raviver ces situations désagréables.

Aujourd'hui, il va me falloir le trouver ce courage car sinon c'est moi qui vais craquer. Je suis encore prête à essayer de maintenir la vie de famille, mais uniquement si nous nous engageons dans un suivi (thérapie de couple, de famille ou autre).

Sinon j'envisagerai une vie plus séparée, en gardant les liens avec mon mari, mais sans partager tout le quotidien...

A bientôt

Re: Vivre avec un conjoint Huntington et des enfants-ado

Message par julien 34 » 25 mai 2019 08:30

Vous avez tout à fait raison de vous protéger

Re: Vivre avec un conjoint Huntington et des enfants-ado

Message par Piano » 29 mai 2019 10:24

Bonjour Clémence

Je vous remercie de votre message.Je comprends que vous essayez d’arrondir les angles et de prendre sur vous afin de ne pas envenimer la situation. Vous vous adaptez in extremis à votre mari et parce que vous êtes bien conscient qu’il et malade de la MH. Avec de la patiente et de la bienveillance.

Il me semble, à ce stade, que vous avez fait un travail d’acceptation assez conséquent. Votre mari , lui est débordé par la MH. C’est comme si il était traversé par une forme d’attaque qu’il projette sur vous et ses proches. Parce que vous êtes les plus proches de lui, vous êtes son entourage.

Ce n’est pas facile mais on pourrait dire que vous êtes le capitaine du bateau. Derrière la façade de la défense, comme s’il était persécuté par ses proches, et ses mots durs, il est totalement débordé, voir même en train de se noyer. A 99% la responsabilité en est la MH, s’il a bien la MH. C’est lié au gène dont il n’est pas responsable. Je ne veux pas l’excuser, mais il me semble qu’il subit la situation, plus qu'il ne la provoque. Il souffre, vous souffrez et les enfants souffrent.

Votre mari refuse d’aller voir un(e) neurologue qui connait bien la MH. Peut-être insister en lui rappelant que le mot SOS renvoie à l'idée des mots secours et obligatoires. Que vous le faites pour seulement l’aider lui et la famille dont il est co-responsable.
Sinon vous avancez par vous-même en consultant éventuellement le(a) neurologue, psy et voir comment faire avec les enfants pour faire une psy familiale. S’il se retrouve à la fin le seul à ne pas être au courant de la MH, il peut bouger.

En tout état de cause, ce n’est pas la MH qui dirige, même si je n’identifie pas entièrement votre mari à la MH, mais c’est vous. Et votre mari certainement est aussi aimé par ses enfants. Il a beaucoup dechoses à leur donner. En deçà ou au-delà de la MH.

Si vous avez des difficultés à dormir ensemble, peut-être aménager, d’une façon ou d’une autre l’espace de façon à ce que vous puissiez, vous, récupérer la nuit. Notre corps se reconstruit la nuit.

A suivre et bon courage à vous Clémence et à tous.

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