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| Conférence annuelle de la Fondation CHDI sur les thérapies dans le cadre de la maladie de Huntington La 20ème conférence thérapeutique annuelle de la Fondation CHDI s'est tenue à Palm Springs en Californie du 26 au 28 février 2025. |
Relier les points : la biologie HTT, du laboratoire à la clinique
Cette cession se concentre sur ce que les chercheurs apprennent sur la biologie de la maladie de Huntington, dans un laboratoire, afin d’éclairer les essais cliniques.
L’architecture génétique – Longhzi Tan
Longhzi Tan de l’Université de Standford a présenté ses travaux sur l’architecture du matériel génétique et l’influence de la maladie Huntington sur sa forme et son positionnement dans la cellule.
Nous possédons un important matériel génétique qui nous rend tous uniques, et son emplacement dans la cellule est important. L’ADN de chaque cellule de notre corps mesure deux mètres de long ! Pour tenir à l’intérieur de chaque minuscule cellule, il doit se plier et se compresser pour y être comprimé. Tan s’intéresse à l’organisation précise de l’ADN dans les cellules et la localisation de chaque gène.
Etonnamment, Tan peut identifier différents types de cellules simplement en fonction de la position de l’ADN à l’intérieur de la cellule. L’organisation de l’ADN et sa position dans la cellule évolue tout au long de la vie.
Il étudie actuellement l’impact de la MH sur l’architecture du matériel génétique chez les souris modélisant la maladie. Il a présenté au public la toute première carte 3D de l’aspect du matériel génétique dans des cellules de souris atteintes de la MH. La maladie provoque des changements radicaux, notamment dans les cellules vulnérables. Tan explique qu’il pense que ces changements entraînent une perte « d’identité » cellulaire – des gènes qui définissent certains types de cellules.
Tan étudie également l’impact potentiel des gènes contrôlant l’instabilité somatique sur l’architecture génétique. Il s’est notamment intéressé au gène modificateur Msh3. La diminution des taux de Msh3 chez les souris MH semble corriger les modifications de l’architecture génétique engendrées par la MH.
Le message à retenir est que cibler Msh3 dans différents modèles MH pourrait permettre de restaurer à la normale de nombreuses caractéristiques de la MH. Ce type d’analyse très détaillé confirme que Msh3 est une bonne cible pour les scientifiques souhaitant développer de nouveaux médicaments.
Des protéines conçues par ordinateur – Kejia Wu
Les travaux de recherche de Kejia Wu de l’Université de Washington tentent de concevoir de nouveaux types de protéines pour effectuer des tâches spécifiques et utilisent tous types d’outils spécialisés d’apprentissage profond et guidées par l’intelligence artificielle pour essayer et imaginer de nouvelles conceptions.
Kejia s’intéresse au ciblage des fragments flexibles des molécules protéiques. Il s’avère que ces régions flexibles sont vraiment importantes à tous les aspects de la biologie mais elles sont généralement considérées comme « intraitables ». Kejia espère cibler ces régions flexibles avec des protéines nouvellement conçues, que ses méthodes informatiques guidées par l’intelligence artificielle déjouent.
La protéine huntingtine possède de nombreuses régions flexibles, dont les scientifiques ont démontré l’importance pour la protéine afin qu’elle sache où se diriger dans une cellule et avec quelles protéines se concentrer. Kejia applique sa technologie à la huntingtine pour tenter de concevoir de nouvelles protéines ciblant la longue chaîne de glutamines située au début de la protéine responsable de la maladie. La protéine huntingtine classique possède une chaîne de glutamines semblable mais beaucoup plus courte. Toutefois, la différence est subtile, et trouver quelque chose de sélectif est difficile.
Le fragment toxique HTT1a – Gill Bates
L’équipe de Gill Bates, de l’University College London, se concentre sur un type de protéine huntingtine, appelé HTT1a. Il s’agit d’un petit fragment de la protéine huntingtine qui forme des amas toxiques dans les cellules.
Elle étudie la quantité de la forme HTT1a produite dans différents modèles de la maladie de Huntington. Il s’avère que plus la longueur de répétition de la mutation HD est longue, plus la production de HTT1a est importante. Parallèlement, les taux de la forme complète de la huntingtine diminuent.
L’équipe de Gill a ensuite cherché à déterminer s’il y avait des changements dans la quantité de protéines formant des amas toxiques. Ils pensent que la HTT1a pourrait être le catalyseur de la formation d’agrégats de la protéine huntingtine. Pour essayer de comprendre cela, ils ont utilisé un modèle murin MH particulier, incapable de produire HTT1a. Ces souris présentent beaucoup moins d’agrégats que les souris MH classiques, et ces agrégats se forment plus lentement.
Ces amas protéiques, appelés également agrégats, sont considérés comme toxiques pour les cellules de multiples façons. L’un des mécanismes les plus étudiés est la manière dont les amas présents dans le noyau des cellules, où le matériel génétique est stocké, peuvent influencer l’activation ou la désactivation de gènes. Gill et son équipe ont étudié la manière dont les amas présents dans le noyau suivaient ces modifications génétiques. Plus ils observaient d’amas, plus ils observaient de modifications génétiques.
Les scientifiques MH essaient toujours de déterminer exactement dans quelle mesure chaque type de protéine huntingtine est responsable de la maladie dans le cadre de la MH. Gill et ses collègues utilisent des outils génétiques ciblant uniquement un type de protéine huntingtine pour déterminer ce qu’il se passe.
En étudiant les taux d’agrégats et les gènes activés et désactivés, ils ont constaté que la diminution de la quantité de HTT1a et de la huntingtine expansée avait un effet plus important. En revanche, ils n’ont pas observé d’effet significatif pour la diminution d’autres types de protéine huntingtine chez les modèles murins utilisés. Ceci est important pour le domaine car les scientifiques disposent en clinique toutes sortes de thérapies diminuant la protéine huntingtine, qui chacune agit légèrement différemment et réduit différentes formes de la protéine huntingtine présentes dans la cellule. Les scientifiques ne savent pas encore quelle méthode sera la plus efficace chez l’homme, et plus ils en sauront à ce niveau moléculaire précis, mieux ce sera.
Gill travaille avec le laboratoire Khvorova aux Etats-Unis pour concevoir de nouveaux outils aux fins de diminuer les taux de la HTT1a. Ils développent des siRNAs qui ciblent les molécules messagers huntingtin et réduisent les taux de la protéine HTT1a.
L’influence des amas protéiques sur l’instabilité somatique – Won-Seok Lee
Le laboratoire McCaroll a publié une étude montrant que les cellules vulnérables dans le cadre de la maladie de Huntington présentaient une expansion somatique – c’est-à-dire une augmentation importante de répétitions CAG dans certaines cellules.
Les scientifiques observent de nombreux agrégats chez les modèles murins MH présentant d’énormes répétitions CAG. Chez l’homme, seules quelques cellules présentent ces énormes répétitions CAG et on observe relativement moins d’agrégats. En revanche, les scientifiques ne savent pas si les cellules présentant des agrégats sont les seules avec un long nombre de répétitions CAG.
L’équipe du laboratoire McCarroll a cherché à comprendre cela. Ils ont trié des échantillons de cerveaux humains post-mortem pour identifier les cellules présentant ces agrégats. Ils ont ensuite découvert que les types de cellules cérébrales présentant ces agrégats sont les neurones à projection épineux – des cellules davantage impactées par la MH – présentant également un plus grand nombre de répétitions CAG.
Ils ont ensuite étudié comment les gènes étaient activés et désactivés dans ces cellules et ont observé que ces cellules présentaient des signatures génétiques plutôt bancales, certains gènes étant activés alors qu’ils auraient dû être désactivés et vice versa. Il s’agit d’une importante nouvelle car elle relie l’instabilité somatique à la formation d’agrégats dans des échantillons de tissus humains et à une régulation génétique perturbée, caractéristique de la MH.
Ils ont essayé ensuite de déterminer quel type de protéine huntingtine était présent dans les agrégats et il s’est avéré qu’il s’agissait principalement du fragment HTT1a décrit précédemment par Gill. Ces travaux aident à comprendre comment chaque forme de la huntingtine contribue à la maladie, ce qui est important pour cibler la bonne version avec les thérapies.
Essais non cliniques du SPK-10001 – Spark Therapeutics
La compagnie Spark Therapeutics est une compagnie de thérapie génique spécialisée dans le cadre de la maladie de Huntington. Elle conçoit des thérapies géniques diminuant les taux de la huntingtine. Le traitement est encapsulé dans un virus inoffensif pouvant ensuite infecter les cellules pour y introduire le mécanisme qui réduit la huntingtine.
La meilleure méthode trouvée par cette compagnie pour administrer leur médicament était l’injection directe dans le cerveau. Bien que cette méthode puisse paraître intimidante, le médicament a généralement bien agit chez des modèles animaux testés lorsqu’il était administré de cette façon. La compagnie Spark travaille à l’amélioration de son processus chirurgical afin de réduire les effets secondaires.
Leur médicament, SPK-10001, semble bien se propager dans le cerveau et les taux de huntingtine diminuent suivant un effet de dose-dépendant : plus on administre ce médicament, plus les taux de huntingtine diminuent. La compagnie Spark a suivi des animaux pendant une année après l’administration du médicament et la situation semblait globalement normale en termes d’effets secondaires, de modifications des structures cérébrales, etc. Les taux de NfL semblaient également se stabiliser dans un délai raisonnable. Cela suggère que le médicament est bien toléré.
Traduction Libre (Dominique C . - Michelle D.)
Source :
- Article des Dr Rachel Harding, Dr Tamara Maiuri et Dr Sarah Hernandez du 2 mars 2025
